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Le petit journal de Monique - Roumanie 2013 |
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Sighetu, cimetière de la joie
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La santé, suite... |
Sighetu, la suite... |
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Nous devons attendre que Elliana sorte de son
travail pour nous installer et faisons un petit tour de ville. Comme un
peu partout en Roumanie, une forte densité de lieux de cultes de toutes
confessions, parfois deux ou trois pour la même, ponctue la rue
principale. Francine me montre la frontière avec l'Ukraine et me
déconseille de sortir mon appareil photo : elle a emmené une jeune femme
l'an dernier laquelle a échappé de justesse à des représailles parce
qu'elle avait pris un cliché, (en tout cas elle a dû s'expliquer sur ses
intentions). On ne plaisante toujours pas en cette ville tristement
célèbre pour les exactions qui y ont été commises (comme en beaucoup
d'autres endroits d'ailleurs).
Mais revenons pour l'instant à
notre hôtesse : elle ne fait certes pas partie des gens que je suis
venue aider avec Francine, mais sa situation met en évidence les
difficultés de survie d'une personne d'un milieu moyen dès l'instant où
elle est confrontée à un ou plusieurs accidents de la vie. En France il
existe encore un système de solidarité ou d'assistance qui se défend
bien quoique l'on en dise. Ici, la note n'est pas difficile à établir
sur ce point, c'est un triple zéro et des bâtons dans les roues en
veux-tu en voilà...
Cette dame d'environ 55 ans a été veuve à 34
ans. Elle travaille au musée mémorial du communisme tous les jours de la
semaine pour environ 700 lei par mois (110 euros) et doit avec cela,
subvenir à ses besoins et à ceux de son fils qui vient de finir des
études de théologie mais qui n'a pas de travail. Comme un malheur
n'arrive jamais seul, sa fille de 32 ans a été victime d'un AVC. Elle
vit près de sa grand mère de 80 ans mais celle-ci doit être hospitalisée
pour un diabète qui se révèlera être insulino-dépendant (et c'est une
catastrophe d'avoir une maladie chronique ici : ne croyez pas qu'une
infirmière libérale viendra chez elle chaque jour faire sa piqûre, il
n'y en a pas. Ne croyez pas que l'on va chercher son médicament à la
pharmacie la bouche en cœur avec sa petite ordonnance. Ne croyez pas
cela, c'est la croix et la bannière, la ruine et le parcours du
combattant pour obtenir un médicament même essentiel à sa survie !). Les
problèmes de santé de la grand mère vont de toute évidence aggraver la
situation de toute la famille. Cette dernière faisait encore un jardin
potager qui venait bien en aide à Elliana sur le plan alimentaire et il
n'est pas sûr qu'elle puisse continuer.
Ce n'est du reste pas
d'aujourd'hui que la famille connaît le malheur et n'est peut-être pas
par hasard qu'Elliana travaille au mémorial du communisme puisque
plusieurs personnes de sa famille (un grand-père une grande tante
religieuse), furent arrêtés et mis en prison sous le régime communiste
parce qu'ils étaient gréco-catholiques et refusaient de se rattacher à
la religion orthodoxe. Ils subirent des sévices et des privations au
delà de l'imaginable (la religieuse a eu les pieds gelés et en garde de
graves séquelles). Lorsqu'ils furent enfin libérés, tout ce qu'ils
possédaient avaient été pillé.
Eliana sort de son travail à 7
heures. Elle m'installe devant la télévision tandis qu'elle se dépêche
de faire à manger pour tout le monde (sa mère est là puisqu'elle doit
l'emmener demain à l'hôpital avant de partir au travail). Elle a allumé
le feu sous le chauffe-eau pour que nous puissions faire notre toilette
(c'est comme çà et ça marche très bien). La maison pourrait être très
sympa mais transpire de pauvreté... Il faudrait un plombier, un
menuisier, un peintre peut-être une femme de ménage (Elliana n'a guère
le temps de fignoler) enfin tous les corps de métier pour tout remettre
d'aplomb. Ceci dit Elliana réussit à nous préparer de bons repas (nous
lui remettrons une somme d'argent à notre départ car il est inconcevable
qu'elle nous entretienne : ce serait un effort dont elle aurait sûrement
du mal à se remettre).
Puisque nous sommes coincées Francine et
moi dans le petit salon où nous allons manger et dormir et que nous
regardons la télévision (c'est aussi l'occasion de faire des progrès en
Roumain), je vous fais part de deux émissions intéressantes que nous
avons suivies.
La première concerne une grande manifestation à
Bucarest pour protester contre le projet d'exploitation d'une mine d'or
à Rosa Montana : il s'agit d'un site déjà exploité dans le passé. La
controverse porte sur le fait que ce sont des investisseurs canadiens
qui sont porteurs de ce projet (quel apport pour la Roumanie ?), sur les
incidences écologiques et celle concernant le risque de dégrader le
patrimoine touristique de l'ancienne mine d'or, et enfin sur les
incidences économiques. Certes le projet va procurer du travail aux
gens pendant quelques années et la population de cette zone très
sinistrée est en demande mais qu'adviendra-il lorsque tout cela sera
terminé? Nous apprenons en rentrant à la maison que le premier
ministre est favorable à l'abandon du projet ce qui ne laisse pas
d'étonner étant donné que le contrat semble signé entre l'état roumain
et les canadiens (les mystères de la Roumanie)...
Deuxième sujet
très sérieux : une petit garçon de 5 ans vient d'être tué à Bucarest par
un de ces milliers de chiens errants en Roumanie. Va-t-on euthanasier
tous les chiens, les stériliser, Brigitte Bardot s'en est mêlée mais n'a
toujours pas proposé de les emmener avec elle... Elliana trouve qu'il
existe des problèmes plus importants à traiter en Roumanie...
Monique
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