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Sarah
Psychologue
Suisse |
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Après
trois mois riches en expérience, difficile de savoir par quoi commencer
pour résumer au mieux mes impressions sur ce voyage. alors je parlerai
tout d'abord de ce pays qui m'était jusque-là inconnu, voire méconnu, et
dont j'ai eu la chance de découvrir de nombreux aspects. Cette Roumanie
aux multiples facettes, à la fois forte, maligne et désenchantée.
Un de
mes premiers étonnements fût de réaliser que je me sentais parfaitement
en sécurité en me promenant dans les rues des villes, et que la jeune
génération ressemble à la nôtre, mis à part quelques différences
culturelles, notamment leur appartenance forte à la religion orthodoxe
et le respect des coutumes qui y sont liées. Le lien familial et
intergénérationnel est encore très présent en Roumanie, c'est un aspect
que j'ai beaucoup apprécié. De même, le rapport avec la nature y est
encore très présent : les métiers de l'agriculture, de la construction,
du bois et de l'artisanat (céramique, habits traditionnels, napperons)
sont majoritaires ici. Le dimanche, les familles vivant dans les blocs
partent prendre un bol d'air à la montagne ou à la campagne, arrêtant le
plus souvent la voiture au bord de la route et pique-niquant là... Il
faut avouer que la nature est superbe ; collines, champs, rivières,
réunis en de vastes espaces. Dommage que les gens n'aient pas plus
conscience de l'écologie, car la pollution du côté de la mer noire, des
rivières et des montagnes devient un réel problème.
A mon avis, les difficultés majeures que l'on a pu trouver dans les
familles sont en rapport avec la corruption- faisant partie intégrante
du système (études, soins hospitaliers, emplois, transports publics,
etc.), tout se paye en plus du prix officiel ! - et au manque de
prévention et d'éducation à ces niveaux-ci : contraception,
prostitution, violences conjugales, alimentation, consommation d'alcool,
responsabilité du rôle de parent, rapport à l'argent.
En marchant dans les rues donc, on s'imprègne facilement de l'atmosphère
simple et humaine qui caractérise les gens d'ici. Ce n'est que lorsque
l'on entre au sein des foyers que l'on se rend compte des séquelles
laissées par l'histoire du pays et des problèmes rencontrés au quotidien
par les roumains qui les laissent avec de grandes carences affectives et
matérielles. La période communiste en particulier a engendré d'amères
souffrances et une méfiance à l'égard des autres citoyens, même si
aujourd'hui les gens vivent libres. Par contre, l'accueil des étrangers
est incomparable. Effectivement, quelque soit le niveau social de la
personne, préparer un copieux repas typique pour les invités (et les
laisser manger seuls !) est une coutume extrêmement importante en
Roumanie. Souvent, lorsque nous avons été hébergés chez des personnes
très pauvres, ou même lors de la distribution mensuelle du parrainage,
nous repartions le ventre plus que rempli alors qu'eux-mêmes n'avaient
pas mangé depuis plusieurs jours. Dans ces moments-là, on se demande,
une fois de retour à la maison, de quel droit on se permet de manger
tous les jours à sa faim et à son goût...
En ce qui concerne la population, elle est essentiellement roumaine, le
pays étant encore peu touristique malgré les richesses qui s'y trouvent.
Néanmoins, au sein du pays existent trois cultures bien distinctes :
celle des roumains, orthodoxes, blancs, vivant dans des maisons ou des
blocs.
celle des tsiganes, très stigmatisés, mats de peau, souvent baptistes,
vivant dans des quartiers à l'extérieur des villes ou dans des squats.
celle des hongrois, parlant le magyar, catholiques ou protestants,
répartis dans tout le pays mais en plus grand nombre dans le département
du Harghita, petit pays dans le pays, qui selon eux reviendra bientôt à
la Hongrie.
Au premier abord, je n'avais pas imaginé qu'il y ait une telle
différence entre roumains et tsiganes. Pour moi, tous les roumains
étaient des tsiganes plus ou moins nomades, plus ou moins éduqués. Mais
ici la discrimination est grande de la part des roumain envers les
tsiganes. Ils les voient comme le peuple mendiant et voleur, n'ayant
droit à aucune faveur à cause de leur nature « pécheresse ». C'est vrai
qu'ils ont un mode de vie qui leur est propre, mais j'ai pu constater
que des tsiganes honnêtes cherchant à s'en sortir n'ont vraiment pas la
tâche facile; on ne leur donne pas de travail ni d'appartements, ce qui
les cantonne à rester dans le même fonctionnement en quelque sorte...
Quant aux rapports qu'ont les roumains et les hongrois entre eux, j'ai
été surprise, pour ne pas dire choquée, de voir des commerçants hongrois
refuser de vendre un gâteau typique à des roumains, et ne pas leur
adresser la parole. Voilà, on se tolère mais c'est tout.
Je voudrais, pour terminer, aborder un autre aspect crucial de mon
séjour ici, à savoir les enfants. Que dire d'eux sinon que, ce petit
quelque chose qu'ils ont en plus, un cœur authentique et altruiste, ils
l'ont gardé justement par ce qu'ils n'ont rien. C'est là la plus grande
richesse des roumains, l'âme de leurs enfants... Ces derniers restent à
la maison durant les vacances, souvent dans une ou deux petites pièces,
et tournent en rond, surtout en cas de mauvais temps.
En observant ces conditions-là, j'ai compris la réelle importance de
notre travail d'animation durant l'été, activité qui sans cela peut
paraître un peu « distractive », mais nécessaire pour ces enfants ne
pouvant pas partir en vacances et constamment sous le joug des problèmes
familiaux. D'ailleurs, ayant visité la centre de placement de Brad et
côtoyé les enfants placés là-bas durant le camp de neuf jours, je me
suis plusieurs fois fait la réflexion de ces enfants avaient presque
plus de chance que ceux restant dans leur famille. Cela peut sembler
étrange de notre point de vue, mais effectivement dans le centre les
conditions de vie minimales (lit, nourriture, chauffage, eau chaude,
soins médicaux, scolarisation) leurs sont assurées. Aujourd'hui, les
enfants ne sont plus à proprement parler orphelins, ils se retrouvent
dans un centre lorsque les parents sont partis travailler à l'étranger,
que l'un des parents est décédé et que l'autre boit, ou alors chez les
grands-parents qui doivent élever et nourrir leurs petits-enfants.
Admirables grands-mères...
Voilà, après tout ce que j'ai pu vivre durant ces trois mois, je repars
avec des images plein les yeux, des sourires d'enfants, des paysages,
des villes, des familles, des églises orthodoxes, des maisons aux formes
étranges et hautes en couleurs, des animations préparées avec soin, mais
aussi la vie en communauté, les rencontres très intéressantes avec les
autres bénévoles, avec sœurs et prêtres hors du commun rencontrés en
chemin, l'immense travail que Francine fait, une langue que j'aurais
souhaité approfondir car elle est magnifique, des recettes typiques,
enfin un mélange de tout cela qui ne me fait pas regretter une seconde
d'avoir tenter l'expérience.
Sarah
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