Association Casa de Copii

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La page de Claire - 2005
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Casa de copii - Claire en Roumanie - Eté 2005 Claire

étudiante en psychomotricité, Toulouse.

En premier lieu, je voulais évoquer ma motivation fluctuante dans mon engagement dans APOR, Action Pour les Orphelins Roumains, association des étudiants en deuxième année de psychomotricité. Les certitudes du début de l'année de préparation, puis quelques nuages, parce que, tout d'abord, j'avais tendance à estimer que pour mettre en place un vrai travail en psychomotricité, installer une relation avec les enfants, voir des progrès et y rebondir, il faudrait au moins 6 mois, de même que pour échanger efficacement avec le personnel et apporter des connaissances en laissant aux Roumains le temps de se les approprier. 

Par ailleurs, l'aspect administratif de la préparation du voyage et les démarches pour trouver de l'argent ne sont pas les côtés que je préfère… 

Pourtant lorsque le projet est devenu plus concret, la motivation est revenue ; je suis donc finalement partie et je dois dire à quel point j'en suis ravie.

A l'arrivée, nous avons bénéficié de quelques jours à Baia de Cris, un premier aperçu de la Roumanie. Je me dois d'évoquer l'appui de Renata, une rencontre précieuse, et bien sûr celui de Dona Francine, sa forte personnalité (!), ses choix et son vécu de la Roumanie.

Si l'architecture est appréciable (château de Hunedoara, monastères et édifices religieux…), je suis plus sensible au paysage, et, au milieu de tant de verdure, j'en ai pris sans arrêt plein les yeux. 

Des Roumains, je retiendrai, dans le désordre, un grand sens de l'hospitalité et de l'accueil, une conduite automobile scandaleusement dangereuse, des démarches administratives qui n'en finissent pas, parfois la misère et le silence sur la période Ceausescu…

Puis les choses sérieuses ont commencé. A Simeria Veche, tout d'abord, où, passé l'accueil chaleureux et l'émerveillement face aux locaux, nous avons eu de fortes interrogations le premier soir après avoir entendu quelques mots sur la théorie Waldorffienne en vigueur dans ce centre. Une fois passée la surprise, ce fut l'occasion de discuter de notre vision de la maladie ou de notre pratique. Si nous réfutons catégoriquement l'idée selon laquelle la maladie est une punition divine, ou une mise à l'épreuve divine pour ceux qui la subissent et ceux qui la prennent en charge, comme on nous l'a expliqué, d'autres idées ont été intéressantes à entendre en ce qui concerne les bienfaits d'un cadre naturel (promenade, et baignade journalières), le respect du rythme de l'enfant… 

Nous avons aussi été interpellées sur le risque de traiter le trouble en surface ou de tomber dans le dressage... Sur le plan plus personnel, j'ai écouté les explications anthroposophiques sur la réincarnation de l'âme avec méfiance, puis en riant, puis avec respect, après avoir constaté que cela ne les empêchaient pas d'effectuer du bon travail auprès des enfants. Plus concrètement, à Simeria nous avons constaté un cadre sain, joli, beaucoup d'espace, des enfants respectés et accompagnés et une équipe ouverte à de nouvelles connaissances : "Nous avons appris à nous méfier de la pensée unique" pour reprendre les mots de Costa. Juste quelques surprises : les règles de sécurité sont nettement moindres qu'en France (feu, baignade…), et les repas sont bouclés en un quart d'heure.

Notre action en psychomotricité auprès des enfants de Simeria a été décevante, par rapport à ce qui s'est fait avec les enfants de Vulcan, notamment à cause du délai insuffisant d'une semaine dont nous disposions pour voir un enfant. Pour faire du "rendement", on a du mettre entre parenthèses la phase de mise en confiance et d'instauration d'une relation entre étudiantes et enfants, et aborder directement des bilans. De ce fait, nous n'avons pas fait de la psychomotricité mais tout au plus de l'animation adaptée grâce au matériel spécialisé que nous avions à disposition. En effet, pour les trois enfants les plus déficitaires de Simeria qui nous ont été présentés, nous n'avons pas trouvé d'axes de travail et de plus, les séances étaient stressantes pour eux du fait de la précipitation et de trop de nouveauté à la fois. 

Probablement face à cet échec, les éducateurs ne nous ont pas envoyé d'enfants de Simeria la deuxième semaine. C'est pour remédier à cela que l'on a voulu rendre un rapport écrit complet pour faire passer du théorique, à défaut de pratique. Par contre, les éducateurs, en particulier Emma et Costa le professeur, nous ont témoigné leur amitié en nous emmenant dans une excursion mémorable au château de Hunedoara, à Sibiu et à Siguishoara le dernier week-end.

A Simeria, toujours, mais avec les enfants de Vulcan, le bilan est différent. Les rencontres conviviales avec le personnel, la traduction assurée par Costa, le cadre de vacances qu'est Simeria ont permis aux éducatrices de nous confier des détails sur les enfants avec confiance (bribes d'histoire personnelle, observation, diagnostic). Nous avons pu poser des questions à celles qui connaissent le mieux les enfants et essayer de trouver ensemble des pistes de réponses. Les séances se sont déroulées calmement, on percevait des manifestations de contentement de la part des enfants, malgré le décor nouveau, les personnes inconnues… ce qui peut être stressant pour des sujets autistes. Nous avons pu partager d'autres temps avec ces enfants : balades, baignades…

Globalement, en ce qui concerne Simeria, nous avons la sensation d'avoir donné mais également énormément reçu.

La troisième semaine s'est déroulée à Vulcan où nous avons été tout aussi bien accueillies. Le premier constat est celui de l'affection qui existe entre le personnel et les enfants. C'est une base très importante même s'il reste des choses à améliorer. Les locaux sont très agréables mais se pose le problème de l'exiguïté : la cour est vraiment petite. 

Quelques points restent sombres : violence et pseudo-tyranie entre grands et petits, que les adultes condamnent mais sans conviction, prise en charge de l'hygiène (change) de certains enfants par d'autres enfants, environnement sonore abrutissant (télé, radio à fond sans interruption). Si la surveillance et la prise en charge du quotidien sont assurées, on peut peut-être regretter un certain manque d'activités proposées aux enfants autres que le jeu libre (nous avons toutefois participé à des sorties baignade). Les éducateurs évoquent le manque de temps, de formation, ou de moyens, et certains sont en demande de pistes et de solutions, de même que le directeur et sa femme sont ouverts à l'échange.

Au niveau de notre action, nous avons pu effectuer une évaluation de premier jet pour les enfants que nous n'avions pas vu à Simeria, et des séances en salle, en se répartissant les enfants pour qu'ils soient toujours avec les mêmes étudiantes ; je suis satisfaite de ce qui a été mis en place. Avec notamment l'enfant la plus déficitaire du centre, qui est d'une passivité absolue sans aucune prise d'initiative, aucune exploration spontanée, pas de suivi visuel, quasiment pas de manifestation émotionnelle basique… Nous avons réfléchi à des choses simples à stimuler même si les progrès ne seront visibles qu'à long terme. On peut évoquer aussi une autre enfant, très marquée physiquement avec de lourdes stéréotypies et peu de communication spontanée, de sorte que peut-être on aurait tendance à la croire plus gravement atteinte qu'elle n'est, mais qui s'est avérée, au grand étonnement des éducateurs, avoir un niveau relativement élevé de compréhension et d'aptitudes psychomotrices avec réussite de la quasi-totalité des items proposés, y compris la partie communication non verbale et expressions faciales ce qui est surprenant. 

Je voudrais citer chaque enfant, chacun ayant sa part de surprise et de côtés attachants… Nous n'avons qu'un regret, celui de ne pas avoir pu mettre en place une prise en charge en ce qui concerne l'acquisition de l'autonomie (repas, hygiène, habillage), domaine sur lequel nous aurions possiblement pu échanger des connaissances. Cela aurait demandé une meilleure confiance du personnel, peut-être les équipes des années à venir pourront mieux que nous partager tous les temps quotidiens d'un éducateur, et instaurer une collaboration plus serrée ? 

Même, si, je le redis, nous avons déjà eu de très bons contacts avec l'équipe, malgré la barrière de la langue, et nous leur sommes reconnaissants de leur accueil chaleureux.

Quelques mots enfin sur Baia de Cris, l'appréciable "havre de paix" du week-end, surtout pour les filles du groupe d'Hunedoara qui ont vécu des choses difficiles. Nous avons pu rencontrer trois autres groupes de jeunes bénévoles, décompresser, discuter avec Francine…

Je mets toute ma confiance dans les équipes APOR des années à venir, quant à moi je repartirai volontiers si la vie me le permet.

Claire.